Les lettres qui composent
Le Livre des Disparitions & des Tractations, les textes qu’il dissimule, les calligrammes sacrés et profanes qui l’illustrent, forment un puzzle instable et inachevé dans lequel chaque pièce semble toujours le reflet d’une autre. De ce monde en miroir où chaque communauté scintille à la surface de l’autre, la correspondance aborde les thèmes aussi variés que la peur des étoiles, les traités de chirurgie, l’art de la mémoire, les magies de l’oubli, l’histoire du voile du sultan, les ragots de la Cour du Roi d’Espagne, de
Velázquez Grand Maréchal du Palais, les équations de la douleur, la structure mathématique de la musique des sphères, les pratiques de l’Inquisition, les témoignages des cinq ombres du Christ, les livres de plomb de l’abbaye del Sacromonte de Valparaiso ou encore le cri du Maure sur l’une des trois caravelles à la vue des terres du Nouveau Monde. Ce livre de contes est écrit dans une sorte de langue étrangère, une langue de pirate, un aljamia contemporain dont les syntaxes mêlées témoignent des accords discrets, des ententes ironiques et des passions secrètes qui unirent, un temps, deux communautés déchirées.
Livre symétrique et labyrinthique, tragique et ludique, authentiquement historique et parfaitement fictif, il perd, intrigue, comble ou terrifie ceux qui tentent d’en percer les innombrables mystères.
Raoul Ruiz (1941-2011) est un
cinéaste, homme de théâtre et écrivain. Né au Chili et engagé politiquement, il fut d’abord une figure clé du nouveau cinéma latino-américain. Contraint à l’exil après le coup d’état de Pinochet en 1973, installé en France, il a réalisé, avec plus de 100 films (parmi lesquels
Trois Tristes Tigres, 1968,
Palomita blanca, 1973,
Klimt, 2006 ou
Mystères de Lisbonne, 2010), une œuvre majeure du cinéma international du XXe siècle. Il est aussi l’auteur de fictions et de textes théoriques publiés aux éditions
Dis Voir dans la collection «
Cinéma Fictions » qu’il a inaugurée.